Diastaticus
Une levure qui peut entrainer une surpression ou un gushing
On parle beaucoup depuis quelques mois de cette fameuse diastaticus qui contamine nombre de brasseries artisanales en France mais également dans d’autres pays.
Nous travaillons depuis plus d’un an sur le sujet en collaboration avec de nombreuses brasseries, voici un petit état des lieux :
Diastaticus, de son vrai nom Saccharomyces cerevisiae variété diastaticus est une levure qui appartient à la même espèce que la levure de bière Saccharomyces cerevisiae, elle est identique sur le plan morphologique et métabolique si ce n’est la présence d’un gène (STA) qui lui permet de dégrader et rendre fermentescibles les maltodextrines habituellement non utilisées par la levure. Ce gène code pour une enzyme extracellulaire qui transforme les dextrines en glucose directement utilisable par elle-même mais aussi par tout micro-organisme présent dans la bière.
risque de contaminations croisées
Utiliser avec précautions
Diastaticus peut être utilisée intentionnellement dans une brasserie pour faire des bières sèches, les principales diastaticus commerciales sont la WB06 et la BE134 de Fermentis ou la Belle Saison de Lallemand. Leur utilisation nécessite toutefois certaines précautions. Il faut en particulier s’assurer que la fermentation primaire est totale avant de passer en garde. Comme elles fermentent plus de sucres elles peuvent être plus longues et il peut y avoir un léger plateau entre l’utilisation des sucres fermentescibles et la dégradation des dextrines. Si l’on passe en garde avant l’utilisation complète des sucres il y aura une reprise de fermentation après conditionnement en bouteille ou en fût.
Il faut également veiller à très bien nettoyer et décontaminer la cuve ayant été ensemencée avec une diastaticus avant de la réutiliser. La moindre contamination, aussi faible soit elle, risquera d’engendrer une reprise de fermentation après conditionnement.
Dans certains cas, l’origine de la contamination reste inconnue, nous avons dans certaines brasseries isolé et identifié des levures diastaticus inconnues, nous considérons alors qu’il s’agit de levures sauvages qui ont contaminé le matériel via l’environnement (air, matières premières…).
Il a enfin été évoqué l’existence de lots contaminés chez un fabricant de levures. Si celui-ci s’en défend en arguant qu’il fait toutes les analyses nécessaires avant de libérer ses lots et qu’il n’a détecté aucune contamination croisée au sein de son usine, certains faits sont troublants et nécessiteraient probablement une transparence et une communication plus appropriée. Comment expliquer par exemple que nous avons détecté une diastaticus commerciale dans plusieurs brasseries qui ne l’avait jamais achetée ? Comment expliquer que nous avons retrouvé en laboratoire cette même souche de diastaticus (à l’état de traces mais active) dans un lot de levure non diastaticus ?
Quelles conséquences ?
La présence non souhaitée de distaticus dans une bière après son conditionnement provoquera une refermentation entrainant sur-moussage, gushing voire dans le pire des cas explosion. En fût l’augmentation de pression rendra impossible le tirage de la bière. L’apparition de ces phénomènes peut prendre plusieurs semaines à plusieurs mois (généralement un à deux mois) car la contamination initiale est généralement très faible mais est inéluctable. Les fortes chaleurs accélèrent le développement de la levure donc c’est un phénomène qu’on observe beaucoup plus l’été.
Comment la détecter ?
La seule façon efficace de détecter diastaticus est l’analyse Q-PCR, elle consiste à rechercher par analyse génétique la présence du gène STA. La puissance du signal détecté nous permettra également d’estimer l’importance de la contamination.
Comment s’en débarrasser ?
Si une contamination est avérée, il faut redoubler de vigilance au niveau nettoyage et décontamination. La cuve, les tuyaux et pompes, l’embouteilleuse doivent être décontaminées. Il peut être judicieux de modifier votre process de nettoyage/décontamination en passant sur des produits plus agressifs (rapprochez-vous de votre fournisseur en produits d’hygiène, il saura vous guider).
Une solution radicale est également de ne plus utiliser de diastaticus dans votre brasserie.